La tentation dâun coup dâĂ©clat pour poser son style et son univers peut ĂȘtre forte, lorsque lâon passeaprĂšs une personnalitĂ© aussi imposante que celle de Jobs. Mais Tim Cook nâest pas de ce genre. Puissant et efficace homme de lâombre durant 14 ans, il sâavance dans la lumiĂšre sans peur, mais sans envie particuliĂšre. On sent autant quâil possĂšde lâhĂ©ritage dâApple quâil ne possĂšde pas la puissance de Jobs. Son dĂ©bit calme, presque traĂźnant, ne se fond pas trop dans le langage dâune keynote imaginĂ©e par et pour son prĂ©dĂ©cesseur. La foule ne sây est pas trompĂ©e en restant trĂšs froide durant toute cette confĂ©rence.
Les Updates
La formule reste donc la mĂȘme, avec une ouverture de confĂ©rence sur de gĂ©nĂ©reuses auto-congratulations concernant le succĂšs des Apple Stores, puis des autres produits dont on ne parlera pas aujourdâhui.
. OS X Lion est adorĂ© par la critique, tout en Ă©tant adoptĂ© Ă vitesse grand V par les utilisateurs, bien plus vite que Windows 7. Le graphique passe Ă©videmment par une dizaine de raccourcis rhĂ©toriques mais que voulez-vous: une keynote Ă Cupertino sans une pique Ă Redmond, ça nâexiste pas.
-Le Mac progresse plus vite que le PC. Pas difficile de dépasser un mourant.
-LâiPod a 10 ans et beaucoup lâont dĂ©jĂ oubliĂ©, cela montre Ă quel point lâobsolescence technologique, marketing et symbolique sâaccĂ©lĂšre.
-LâiPhone est le meilleur, merci pour lui.
-LâiPad va bien, merci pour lui aussi.
iOS5, le bien inspiré
Et voici Scott Forstall, sa veste de running noire et son inĂ©puisable discours: iOS est le meilleur, Ă©videmment. La 5e itĂ©ration apportera notamment les notifications (merci Android), iMessage (merci BBM), lâintĂ©gration totale de Twitter (merci⊠Facebook avec qui le deal initial nâa pas abouti) et le raccourci photo sur le bouton de volume (merci Camera +, lâapplication qui avait trouvĂ© lâidĂ©e⊠avant de se faire censurer par Apple), le Reader (merci Read It Later et Instapaper) les tabs dans Safari (merci Perfect Browser) et enfin lâindĂ©pendance de lâordinateur pour lâactivation ou la synchronisation (merci Android, la boucle est bouclĂ©e).
Merci Scott, mais vous nous avez déjà présenté cet exposé il y a pile 4 mois, lors de la World Wide Developers Conference.
iCloud, comme son nom lâindique
Câest maintenant au tour dâEddy Cue et de sa chemise lavande un peu trop grande de nous (re)prĂ©senter iCloud, le service de synchronisation Ă la sauce Apple. Pur produit maison, iCloud semble trĂšs bien intĂ©grĂ© Ă lâĂ©cosystĂšme Ă la Pomme en gĂ©rant nativement le comportement de plusieurs applications pour les synchroniser: vos photos, documents, agendas, achats et apps sâinstallent sur tous vos appareils.
Pourtant, rien nâa Ă©tĂ© annoncĂ© pour les autres dĂ©veloppeurs: pourront-ils profiter dâiCloud ? Et surtout, quels sont les tarifs rĂ©els ? Car sâil est annoncĂ© gratuits pour les utilisateurs dâiOS et Lion, le service reste limitĂ© Ă 5Go de stockage libre pour les mails, documents et les back up. Comprenez: vous allez manquer de place trĂšs rapidement. Il vous en coĂ»tera apparemment 2 deux dollars par Go supplĂ©mentaire par an: 10Go pour 20 dollars, 20Go pour 40 dollars et 50Go pour 100 dollars. Pas mal, comparĂ© Ă DropBox, mais toujours limitĂ© aux appareils Apple.
Ah oui, les iPods
Et voici Phil Schiller qui semble sâĂȘtre remis au sport. Le pitre dâApple sâest vu remettre lâexposĂ©Â le plus gnangnan: lâiPod. Car septembre est traditionnellement rĂ©servĂ©Â aux baladeurs de la marque. Aujourdâhui en dĂ©clin, ils se retrouvent placardisĂ©s à  une portion mineure de la prĂ©sentation. Passage de relai logique pour lâiPhone. Au programme donc, Phil nâa rien à  nous dire. Le Nano ne change pas. Le Touch ne change pas. LâiPod Shuffle ne change pas. Les prix descendent un peu. Et Phil Schiller semble un peu triste de ne pas pouvoir faire lâandouille avec Steve. Et son calvaire nâest pas terminĂ©.
iPhone 4S: le mĂȘme, en mieux
Et voici quâil enchaĂźne sur ce que tout lemonde attend: lâiPhone. Ce sera la version « 4S », tout comme lâiPhone 3Gs reprĂ©sentait une mise à  jour de lâiPhone 3G. Nouveau processeur A5 similaire à  celui de lâiPad 2, meilleure autonomie, nouvelle antenne (ahem), nouvelle partie photo/vidĂ©o. Et un prometteur logiciel basĂ©Â sur la reconnaissance vocale, Siri. Une mise à  jour bienvenue, mais rien de nouveau sous le soleil. Car nous attendons tous lâiPhone 5. Phil nous lĂąchera dâailleurs un joli lapsus en fourchant durant son speech « nous avons crĂ©Ă©Â un tout nouvel iPhoneâŠÂ Une nouvelle partie photo pour lâiPhone 4S ». Il nây aura pas de surprise ici: lâiPhone 4S se pose comme un trĂšs bon tĂ©lĂ©phone et une mise à  jour totalement dispensable pour les possesseurs dâiPhone 4. Bon, travail sĂ©rieux mais sans gĂ©nie. Et si nous passions au gros morceau de lâexposĂ©, Phil ?
iPhone 5: One (no) more thingâŠ
Il nây en nâaura pas. Enfin, pas tout de suite. Plus tard, qui sait. Lorsque Tim remonte sur scĂšne, on sent bien la gĂȘne dans la salle. Comme si les mots « Is That All ? » flottaient dans lâair. Evidemment, nous sommes des geeks toujours plus assoiffĂ©s de nouveautĂ©. Bien sĂ»r, dĂšs quâil sâagit dâApple, notre barre dâexigence est placĂ©e trĂšs haut. Mais ce nâĂ©tait pas le problĂšme hier.
Hier, Apple se devait dâenvoyer un message fort au monde: ses clients, ses concurrents, ses actionnaires. Un message de type: « Nâayez crainte. Nous sommes leaders, nous allons mĂȘme vous le prouver de maniĂšre spectaculaire. » Pourtant, pas dâiPhone 5 pour calmer une concurrence toujours plus mordante.
Pire, cette confĂ©rence restera dans les annales comme celle prĂ©sentant le moins de nouveautĂ©s. iOS5 ? DĂ©jĂ prĂ©sentĂ©, rien de nouveau. iCloud ? DĂ©jĂ prĂ©sentĂ©, rien de nouveau. Les iPods ? InchangĂ©s. LâiPhone ? Une mise Ă jour du 4, sorti il y a bientĂŽt un an et demi. Aucune rĂ©elle surprise, dĂ©gainĂ©e dâun classique « One More Thing ». Seul lâapplication Siri nous a arrachĂ© un sourire, mais la longueur de sa dĂ©monstration exprimait parfaitement son cĂŽtĂ© cache-misĂšre.
Si les raisons de ce manque de nouveautĂ©s seront sĂ»rement rĂ©vĂ©lĂ©es avec le temps, nous ne pouvons que noter sĂ©vĂšrement cette premiĂšre confĂ©rence de lâĂšre Tim Cook. Nous ne lui demandons pas la lune, nous lui demandons juste de continuer Ă dealer un peu de rĂȘve. Jobs avait lâimage dâun visionnaire, qui a servi de moteur Ă Apple. Cook donne lâimage dâun gestionnaire qui ne peut suffire aux besoins dâApple, une sociĂ©tĂ© qui veut justement dĂ©passer son rĂŽle de simple constructeur. Les craintes du public et des investisseurs Ă propos dâun Apple orphelin de Jobs se sont donc justifiĂ©es hier: les critiques ont Ă©tĂ© dures et lâaction a dĂ©vissĂ© de 7% dans la foulĂ©e (une chute temporaire), une premiĂšre. Il convient donc de les reconquĂ©rir au plus vite et de ne pas diluer lâimage de gĂ©nial trublion dâApple, comme Sony a pu perdre son image de « crĂ©ateur » il y a quelques annĂ©es.
ElĂšve Tim Cook, votre copie dâhier est donc Ă oublier. Prochain contrĂŽle en janvier, filez rĂ©viser.